Dire que je me plaignais la dernière fois de ne pas avoir un petit malheur à utiliser pour écrire des articles! Quelqu’un doit veiller sur nous. Tout ce que nous demandons nous est accordé!
Commençons par le désert. Nous voulions du désert, on nous en a donné. Entre Robe et la Péninsule de Fleurieu, que du rien, du rien en grande quantité, avec quelques salines, balayées par un vent extrêmement chaud. La route droite, personne. Bon, une grande différence: ce désert est bordé par la lagune, c‘est le parc des Coorongs. Nous avons déjà donné dans la route défoncée qui ne mène à rien (sauf à un repère de mouches et de moustiques) alors nous nous abstenons de nous arrêter. Tout juste un stop à Méningie pour acheter une glace. Arrivés dans la péninsule de Fleurieu, après le passage en bac du fleuve Murray, le vent chaud n’est pas tombé, il fait toujours 40°C dans le camping-car. Nous nous arrêtons à Strathalbyn au milieu des vignes. La ville est mignonne, avec des maisons en pierres blanches, de beaux vergers, une ancienne voie de chemin de fer; un charme désuet. La chaleur a fait fuir tous les locaux et le camping s’est vidé. Nous allons mettre la climatisation pour faire descendre la température.
Là, j’ai le choix entre 2 options: (a) visiter un chai à 11°C offrant une gamme de rouges francs et forts, des shiraz, des shiraz sur-maturés, des assemblages avec du merlot et du cabernet, des blancs rafraichissants servis avec un peu de fruits de la région; ou (b) emmener les enfants à la piscine. Bon, pour une fois, j’ai pensé un peu à moi et j’ai emmené les enfants à la piscine. L’option (a), cela aurait été quelques minutes de plaisir que j’aurais payé ensuite pendant longtemps, et ce genre de plan, j’ai déjà donné!
Poursuivant le lendemain dans la région viticole de Currency Creek, nous faisons escale à Victor Harbor, station balnéaire des habitants d’Adélaïde, excellente structure de jeux avec une vraie vieille locomotive à vapeur, pour préparer notre séjour sur Kangaroo Island. Nous achetons les billets pour le ferry et faisons le plein de vivres. Un peu plus tard, sur la route vers l’embarcadère de Cape Jervis, le parc de Deep Creek offre une belle étape pour la fin d’après-midi car il regorge d’oiseaux, comme le kookaburra et son chant qui ressemble à un cri de singe, et de kangourous. Ils sont en bandes, plutôt craintifs et font de superbes bonds dès que l’on s’approche à moins de 20 mètres.
Nous dormons sur le port, un œil sur le ferry qui nous emmènera le lendemain.
L’arrivée sur Kangaroo Island se passe sans encombres, alors que le cyclone Yasi s‘approche des côtes du Nord de l‘Australie (je rajoute cela pour faire monter la tension de manière dramatique). Dès la descente, nous filons vers une plage pour manger. La plage de Pennington bay, superbe, fournit le cadre idéal. Nous cherchons dans les dunes des traces de reptiles mais ne trouvons rien pour l’instant.
Ayant déjà profité à loisir de koalas et de kangourous, notre quête animale se concentre sur les goanas (lézard de plus d’un mètre) qui habitent cette île.
Une halte au Nord Est de l’île, à Kingscote, pour acheter un dessert puis nous filons vers une autre plage isolée, Stokes bay, au centre Nord de l‘île. La route de gravillons pour rejoindre la plage se fait à faible allure et nous permet de voir des kangourous (bruns) et des wallabies (plus petits, 50cm de haut, gris foncés).
A l’arrivée, la plage se cache. Il faut emprunter un défilé à travers la roche pour y accéder, ce qui réjouit énormément les enfants.
La plage est vide, magnifique, avec une petite piscine naturelle pour la baignade et la pêche aux crevettes et poissons.
C’est reparti pour une longue après-midi de jeux de plages, de plongée et de réflexion.
C’est au moment de partir que se passe l’improbable. Après avoir préparé nos affaires, nous nous apprêtons à prendre une photo de famille pour immortaliser cet après-midi de régal. Cette photo ne sera jamais faite. Se jouant des circonstances et de notre position isolée, le sort frappe, lâchement.
Instable, mal mis, l’appareil photo laissé seul avec le retardateur tombe dans le sable avant que la photo ne soit prise. Oh, pas longtemps bien sûr car je me précipite pour le reprendre; le mal n’est peut-être pas irréparable. D’autant que là, j’ai la présence d’esprit de ne pas aller laver l’objectif dans l’eau ou de ne pas fracasser le boitier par terre pour essayer de décoller le sable. Non! Avisé, je souffle… Des petites pépites de silice, fruits de la patiente érosion de la roche par le vent et la mer, font leur chemin du devant de la lentille vers le derrière de la lentille. C’est joli, c’est irisé… C’est le drame!
Un cri puissant retentit (je ne peux pas transcrire le texte, c’est assez violent). Un protagoniste lâche un « maman l’avait dit que ça allait mal finir » qui rajoute au mélodrame.
L’appareil photo vient de vivre ses derniers instants. J’hésite à l’enterrer sur place, avec un petit mot, « TZ7, fidèle compagnon, ami inséparable, révélateur de bonheur » mais nous décidons d’emporter sa dépouille. Je suis inconsolable (en un seul mot car solable, ça ne veut rien dire).
A partir de là, mon séjour sur cette île maudite prend une tournure lugubre et il vaudrait mieux que quelqu’un d’autre raconte la fin du séjour car je pourrais manquer d’objectivité. Cela m’étonnerait fort quand même mais c’est possible.
Je m’y colle et on verra.
Quittant la plage avec le soleil déclinant, nous faisons la route de retour lentement, et la lumière douce jette des ombres fauves sur les champs de paille blonde, mettant en valeur les kangourous bruns qui sortent du bush. C’est bon, là, je reste positif, non?!
Les animaux sont nombreux dans le jour déclinant mais comme nous n’avons plus d’appareil photo, cela ne sert à rien! Hop, hop, hop, je dérape!
Nous passons une nuit très silencieuse dans le village de Parndana. J’ai tout le temps de me refaire le film de l’accident un million de fois. Mais il finit toujours mal.
Deuxième jour au paradis des animaux, nous faisons route vers le parc national de Flinders Chase. Celui-ci occupe toute la partie Ouest de l’île. 90 % des routes ne sont pas carrossables pour un camping-car, si bien que nous nous dirigeons vers le centre d’informations pour faire les balades qui en partent. Pas de chance, avec les incendies qui ont ravagé le parc il y a 4 ans (!), les balades sont en majorité fermées. Nous voulions faire la balade d’observation des platypus (ornithorynques) mais seule une baie d’observation sur les 8 est ouverte. Peu nous importe, c’est parti pour la balade. Il faut être silencieux pour ne pas effrayer ces bêtes peureuses. Les enfants sont mis à rude épreuve pendant une heure et demie car le silence n’est pas leur fort. Mais leurs efforts vont être récompensés! Ah ben, non, en fait! On n’en verra pas un! Seul un wallaby qui traverse le chemin devant Louis nous fera souvenir que nous sommes dans le bush. La plupart des arbres sont brulés et la régénérescence est très lente.
Les autres routes nous étant fermées, nous nous dirigeons vers le Sud du parc, vers le Cap du Couedic. Malgré le vent violent, nous allons admirer l’arche des Amiraux, sous laquelle s’engouffre une eau bleue, teintée de vert par l’écume de la houle. Des lions de mer y paressent. La photo serait magnifique. Les côtes sont recouvertes d’un lichen rouge, orange qui tranche avec le vert du bush, le bleu de l’eau et du ciel, le marron de la pierre. Cette photo-là aussi serait très réussie.
Nous nous dirigeons ensuite vers un site appelé « Remarkable Rocks ». C’est sublime. Surplombant la mer déchaînée, des formations rocheuses arrondies par les éléments reposent sur un dôme de granit et laissent voir des cavités tortueuses, des trous béants, des arches. Par endroit, on dirait que la roche a fondu. Le lichen orange recouvre aussi ces roches brunes et les enfants jouent aux koalas dans les cavités. A l’arrière, la terre du bush est jaune. Cela aurait mérité une bonne trentaine de photos.
La route de retour nous laisse voir que 90 % du bush du parc a brulé. Si j’étais de mauvaise foi, je pourrais dire que ce parc est un peu cher, avec son bush détruit, ses balades fermées, mais bien sûr je ne le dis pas. Ou alors pas trop fort. Et puis, c’est de notre faute, si cela se trouve, toutes les routes que nous ne pouvons pas emprunter mènent à des endroits de nature sublimes.
En tous cas, le parc de Flinders Chase réussit à préserver des sites naturels rocheux de belle manière mais ne donne à voir aucun animal de manière exceptionnelle.
En quittant le parc par les routes, je m’aperçois que les routes sont bordées par une bande de bush de 5 à 10 mètres de large, puis que celui-ci laisse place à des champs blonds. En dehors du parc de Flinders Chase, le bush a presque complètement été remplacé par des champs. Plus grand-chose de sauvage, quoi.
Quelqu’un de mauvaise foi pourrait dire que l’île sauvage est recouverte d’une bande de bush au bord des routes pour faire croire, que le seul bush restant se trouve dans le parc de Flinders Chase mais qu’il a flambé à 90%. Ce ne serait pas joli-joli de conclure cela!
Enfin, on se demande où se réfugient les animaux!
Le plus sûr endroit pour voir des kangourous et des wallabies, cela reste le bord de la route. On peut bien les approcher parce qu’ils sont écrasés!
Des koalas, malgré l’explosion de leur démographie sur l’île, c’est assez difficile à voir bizarrement. A tel point que malgré nos plus vives réticences, nous nous rendons dans un des nature sanctuaries, des petits établissements privés qui s’apparentent à des zoos malgré leur nom, et qui font payer pour montrer les animaux qui vivent ici en liberté Alors que nous sommes sur l’île la plus sauvage soi-disant, ici, les koalas, il faut payer pour les voir. Enfin les koalas c’est vite dit. Il y a 2 chemins bordés d’eucalyptus dans lesquels nous apercevons 2 koalas perchés à 20 mètres et, heureusement, une maman et son petit qui dorment à 5 mètres de hauteur. Enfin, payer pour 4 koalas sur une île foisonnant de spécimens alors que nous en avons vus des dizaines en liberté, c’est fort. Le pire, c’est que dans ce parc, au mépris de toutes les injonctions que l’on trouve partout pour supplier les touristes de ne pas nourrir les animaux et mettre en danger leur capacité de survie, les gérants du parc s’assurent de la présence à toute heure de quelques wallabies et kangourous … en leur donnant à manger. La grosse honte de la mort qui tue. Les enfants peuvent donc s’approcher des wallabies et les caresser prudemment. Plus trop sauvages non plus les wallabies. Heureusement que je n’avais pas d’appareil photo pour prendre cela!
Pour finir la journée, nous nous rendons à Vivonne bay et nous installons pour la nuit.
La plage de Vivonne bay a été élue plus belle plage d’Australie par un prof douteux d’une université de Sydney. Elle n’en reste pas moins magnifique. Ce qui la rend belle en fait, c’est l’absence totale d’habitation sur le front de mer. La baie fait un beau demi-cercle, avec des falaises à chaque bout. Des dunes bordent la plage de sable blanc, quelques amas rocheux coupent la plage de temps de temps, l’eau est turquoise et les vagues assez fortes. Le matin, nous allons y rester seuls jusque midi, avant qu’une poignée de personnes n’arrive. Cela nous laissera aussi le temps de chercher des traces de goanas dans les dunes. Les enfants sont assez doués pour cela. Ils repèrent aussi les traces de wallabies, de kangourous (plus grands) et d’opossums. Mais pas les propriétaires!
Dans l’après-midi, nous empruntons la difficile route qui mène jusque Little Sahara. L’endroit est un désert de hautes dunes blanches, et quand on croit avoir monté la plus haute, une autre apparaît. Nous avons emmené la planche de body board et des sacs en plastique pour dévaler les dunes mais cela accroche trop. Le paysage est vraiment singulier et mérite le détour, voire plusieurs photos. Les enfants sur la crête de la dune, les enfants se préparant à sauter la dune pour la dévaler, les roulades dans la dune. Pas de photo de famille sur la dune, c’est trop dangereux, enfin!
Un autre moment important de cette visite de Little Sahara a été notre arrivée au bout de la route. Au moment où je m’apprête à me garer, Virginie aperçoit un goana traversant un chemin. Il est énorme. La bête avance rapidement en zigzagant et je n’ai que le temps de laisser le van au milieu de la route, de crier « tout le monde descend » avant de me ruer dehors. Quand les enfants arrivent, le goana s’est réfugié dans un taillis mais il est bien visible. « Il ne fait même pas un mètre, c’est pas un vrai », dit Louis. C’est vrai qu’il ne fait que 80 cm. « Les vrais font plus d’un mètre, ou alors ce sont des bébés ». Bon, ben moi, il me va le bébé. Comme une autre personne arrive, je me rue dans le camping-car pour aller chercher la carte de mon appareil photo et je demande en allemand à la personne de prendre quelques clichés avec son appareil sur ma carte. Il est alsacien, il me répond en français et me donne 2 photos. C’est chiche un alsacien! Mais bon, grâce à lui, nous avons nos photos de goanas. J’en aurais aimé une dans la longueur, mais bon, OK, …
Les enfants concluent qu’en termes d’animaux, il ne nous manque plus que les très discrets échidnés et platypus, ainsi que le moins discret grand blanc! C’est pas faux et à mon avis, nous n’aurons aucun des 3 avant le départ. L’option «descente dans une cage pour voir les grands blancs» près de l’île Neptune a reçu un veto.
Pour fêter la découverte du lézard, nous allons nous-mêmes lézarder pour le restant de la journée sur la plage de Brown beach, seuls de nouveau. Pour nous y rendre, nous retraversons l’île vers l’Est en dépassant sans nous arrêter Seal bay. A Seal bay, pour 40$, on a le droit de regarder depuis des plateformes de loin les phoques sur la plage. Pour le double, on peut être accompagné pour se rapprocher de la plage. Comme nous avons déjà marché à côté de phoques en liberté en Amérique du Sud, nous filons.
Nous dormirons le soir à Penneshaw pour prendre le bac du matin à 8h30 et rentrer sur le continent.
Que conclure de notre séjour sur l’île?
D’abord qu’ils ont su préserver de belle manière quelques sites naturels. Ensuite que le côté sauvage vendu avec moultes opportunités d’observer des animaux nous a un peu déçu. Mais qui dit tourisme de masse impose des règles et des coûts pour préserver la tranquillité des animaux. Cependant cela transforme l’île en un grand zoo plutôt qu’en une contrée d’aventure comme nous l’imaginions. Enfin, je crois qu’il faut rajouter que la nature est plutôt cruelle envers les appareils photo.
De retour sur le continent, nous filons vers Willonga, où se tient le samedi, dit-on, le plus grand marché de producteurs d’Australie!
Il y a bien un marché avec des producteurs de la région (lait, amandes, miel, raisins, fraises, pommes, prunes, courges en tous genres, tomates, …, agneaux, gibiers, et même de la saucisse donc une appelée French Toulouse!). Mais si des Australiens font le voyage jusqu’au petit village de Léguevin (31490), ils vont halluciner sur la taille de notre marché. Pareillement, si des maraichers de Léguevin font le déplacement jusque Willunga (SA), ils vont s’esbaudir du prix auxquels on peut vendre des légumes et des fruits!
Une fois fait le plein de frais, notre prochaine halte est pour la ville centrale de la route des vins au Sud d’Adélaïde: MacLarenVale. Nous y déjeunons de meat pies couronnées de prix mais indigestes. Comme le vent est trop fort pour profiter des plages de Maslins, nous nous rabattons sur un adventure playground, une super aire de jeux, pour que les enfants se défoulent.
Cela fait plusieurs jours que nous sommes coupés du monde et nous n’avons aucune idée de ce qui se passe en Côte d’Ivoire, en Tunisie, en Egypte, au Sud-Soudan?! Et qui a pris la tête du Top 14? Mais impossible de mettre la main sur une connexion internet. Quand enfin j’en accroche une le soir, je m’abonne et la met en veille pour en profiter après le coucher. Mon compte est totalement débité pendant que nous mangeons. C’est l’écœurement. J’attendrai le lendemain!
Sauf que le lendemain, c’est dimanche, le dernier jour avant de rendre le camping-car et nous n’avons pas une minute à nous. Pendant que les enfants enchaînent les bonds sur les jumping pillows, les bonds dans la piscine, les jeux dans le bateau de pirates, etc, nous vidons le camping-car, faisons les lessives, faisons les sacs, nettoyons le véhicule. Bref, nous passons tous une excellente journée bien remplie, chacun à nos activités favorites.
Demain, nous passons la journée à Adélaïde, le surlendemain, nous prenons un avion pour Sydney puis un autre pour Bangkok. Encore une étape qui se termine et avec elle la moitié du voyage!