Nous sommes dans l’avion de Bariloche vers El Calafate. Depuis l’avion, on voit déjà les glaciers du parc national Los Glaciares. 40% du parc est couvert par des champs de glace et 13 glaciers majeurs alimentent deux grands lacs: le lac Viedma au Nord (près duquel se trouve la ville d’El Chalten) et le lac Argentino (près duquel se trouve El Calafate). Depuis l’avion, on voit bien le glacier Viedma, le plus grand d’Amérique du Sud. On prend de l’avance sur les prochains jours!
Le lac Argentino est un lac bleu-vert sur lequel passent des icebergs, comme des feuilles de saule, légers et fragiles (en ce moment, je fais faire de la poésie à Théo, alors cela déteint). On aperçoit aussi des flamands roses dans les lagunes peu profondes qui jouxtent le lac.
A El Calafate, nous nous dirigeons vers l’auberge où nous attendent les Fourcade. Nous avions réservé ailleurs mais nous nous sommes aperçus hier soir que la réservation était pour novembre 2011; ça fait tard! C’est mieux comme ça car les Fourcade ont retardé leur départ pour nous croiser avant de prendre la route 40 vers le Nord et rejoindre Bariloche. Ils viennent de faire 4000 kilomètres en Patagonie et finissent leur boucle alors que nous commençons la nôtre.
Les enfants sont super contents de pouvoir courir, jouer au foot, au bazooka, à des trucs de garçons, avec le grand Louis et Paul. Mathilde peut avoir la paix pour un moment.
Pendant ce temps, nous comparons nos itinéraires, nos projets, avec Carole et Fabien et nous partageons une bouteille de vin. Le soir, c’est l’anniversaire de Virginie, et comme d’habitude, c’est Louis qui souffle les bougies avant tout le monde. Aujourd’hui, ce n’est pas une bougie mais une allumette; les gâteaux sont bons quand même.
Nous passons une agréable soirée à discuter de voyages et à échanger nos films. Cela nous fait plaisir de croiser une famille dans notre situation plutôt que des voyageurs seuls car les expériences et soucis sont similaires. On se sent moins seuls! On lisait leur blog pendant la route donc c’est comme si on les connaissait déjà un peu et on avait très envie de les rencontrer.
Le lendemain, ce sont déjà les adieux. Nous nous croiserons peut-être de nouveau à Tahiti ou en Nouvelle-Zélande. Les enfants vont nous poser la question pendant plusieurs jours: « quand est-ce qu’on revoit les copains?». Ben oui, ne pas avoir de copains sur la route c’est dur!
Le temps n’est pas complètement dégagé sur le Perito Moreno mais nous tentons quand même la visite avant la pluie. Il semble que la DDE locale ait décidé de ménager le suspens jusqu’au bout en traçant une route qui tourne tout le temps, en plaçant des petites montagnes juste au moment où on pourrait apercevoir le glacier, si bien que l’on tombe dessus, à un moment où l’on avait abandonné, en criant un « Ah le voilà ».
De la taille de Buenos Aires, entre 40 et 60 mètres de haut et 5 kilomètres de large, on ne peut pas le manquer, pourtant il se cache longtemps. Le site est très bien fait, il propose des passerelles tantôt en hauteur, tantôt le plus proche possible de l’eau, sur les 2 flancs du glacier afin de bien en profiter. Nous allons bien sûr arpenter toutes les passerelles en courant.
Ben, c'est blanc, bleu et beau!
L’activité principale consiste à parier sur où va se produire le prochain craquement. En effet, comme le glacier avance dans le lac, il se casse régulièrement et s’effondre avec fracas dans l’eau, le bruit résonnant sous le glacier et dans la vallée alentour. Le moindre petit bout de glace qui tombe produit un coup de tonnerre. Il faut donc deviner où va se produire le prochain effondrement pour aller se placer en face.
Là, c'est juste en retard:
Là, c'est mieux.
Après avoir fait toutes les passerelles, la pluie ne venant pas, nous avons pris un bateau pour approcher le glacier de plus près, mais cette fois, pas d’effondrement devant nos yeux, juste de la navigation entre les icebergs surplombés par la falaise de glace. L’eau, comme celle du lac et des rivières est bleu turquoise, un peu laiteuse.
Le soleil se cache et le froid se fait plus pinçant donc nous rentrons boire un chocolat chaud à El Calafate, re-goûtant au passage les gâteaux que nous avions dégustés la veille. Pourtant, les Fourcade nous ont prévenu, dans 3 semaines, c’est Tahiti et il serait temps de penser au maillot! Une dernière petite marche au bord du lac pour aller voir les oiseaux et nous nous préparons.
Le lendemain, malgré les prévisions de pluie, le temps est superbe et nous faisons la route en bus vers le Nord, vers El Chalten et le Fitz Roy. Nous traversons la steppe où pas grand-chose ne pousse, manque de pluie et trop de vent. Comme le temps est clair, nous apercevons de nouveau le glacier Viedma qui descend dans le lac du même nom, puis le Fitz Roy et le Cerro Torre, les 2 monts les plus prisés des alpinistes. Ils ne sont pas très hauts (3400 m et 3100 m) mais leur ascension est ardue, notamment à cause du vent. La nature change à mesure que l’on se rapproche et la végétation, qui profite des pluies provoquées par les massifs, reprend du vert.
El Chalten est une toute petite ville de 600 habitants, uniquement construite pour le parc. Elle a été créée il y a 25 ans lorsque le parc national le fut, et son cimetière n’a pas encore servi. Elle sert de base d’exploration du parc et de centre de racket des touristes. C’est loin donc tout est cher. Le 1er novembre commence la haute saison et les prix prennent 25% de plus. 25% de plus que cher, c’est très cher.
Le parc, lui, est gratuit pour l’instant et compte sur la bonne conduite des visiteurs pour son entretien et sa conservation.
El Chalten, comme le reste de la Patagonie, est aussi une réserve de Français. C’est comme les Baléares pour les Allemands. On en croise partout, énormément, et on se demande si ce sont des migrants ou s’il y a un centre de reproduction pas loin. Il y a des régions, comme celle-là, qui attirent irrésistiblement tout le monde. Tout ça à cause de Florent Pagny!
Le jour de notre arrivée est une journée comme il y en a peu ici, le ciel est bleu azur et les nuages complètement absents. Ce matin, le soleil a dû embraser la montagne et les photographes ont du se régaler! De nouvelles cartes postales vont être imprimées sous peu. Il est malheureusement trop tard pour entreprendre une randonnée alors nous nous contentons de gravir les premières collines pour aller chercher des bâtons/cannes/épées/mitraillettes/baïonnettes et de casser des cailloux.
Quel dommage, car le lendemain, le temps classique revient et les nuages enrobent les montagnes. Nous partons tout de même vers la Laguna Capri d’où on a une belle vue du Fitz Roy (3 heures de balade) mais après avoir pris un détour/raccourci pour récupérer un bâton laissé la veille, nous nous trompons de chemin. Au bout d’une heure, nous nous apercevons que nous sommes dans la mauvaise vallée, en route pour la Laguna Torre, d’où on a une belle vue du Grand Glacier et du mont Torre. C’est une balade de 6 heures qui s’engage! Alors au lieu de voir les nuages qui cachent le Fitz Roy, on ne pourra voir que les nuages qui cachent le Cerro Torre! C’est pas la même chose quand même! Pourtant, il est là, juste au-dessus du glacier!
La balade est très jolie mais il faut constamment nouer un foulard, remettre une polaire, enfiler le coupe-vent, mettre le bonnet et les gants puis tout enlever car le vent souffle par intermittence et le soleil joue à cache-cache avec les nuages, provoquant de grosses sautes de température. On croise de nombreux lapins, mais pas de huemul (la biche en voie de disparition qui habite le parc).
Sagement, Virginie et les enfants décident de rebrousser chemin une heure et quart avant la fin. Alors je pars tout seul en footing pour atteindre le lac dans lequel tombe le glacier. Je n’aurai pas plus de chance, les nuages restent accrochés à la montagne et le Cerro Torre reste invisible.
Je les rattrape en petite foulée et nous finissons la balade en passant par un autre sentier pour varier les plaisirs ou la torture, selon le point de vue.
Notre auberge est une vraie de vraie, avec une seule salle de bains pour les 7 dortoirs, un petit lieu de vie sonore, une connexion internet défaillante et des murs/planchers en papier cigarette qui permettent de tout partager avec ses amis. Comme 90% des habitants sont Français, on comprend tout ce qu’on entend. C’est sympa. Il n’y a que le prix qui ne cadre pas avec le reste, c’est celui d’un 3 étoiles.
Samedi, le temps est couvert puis pluvieux; le temps du dimanche ne s’annonce guère mieux. Alors nous repartons vers El Calafate, laissant à regret les autres balades que nous aurions pu faire, tous les condors que nous n’avons pas vus et quittant avec joie notre lieu de villégiature, qui a accepté avec difficulté de nous faire payer le prix d’adhérents auberge de jeunesse (sous prétexte que les enfants n‘avait pas de carte personnelle)!
Nous allons faire un transit à El Calafate avant de partir pour le Chili, pour Puerto Natales, où nous allons loger chez une famille de Chiliens que nous avons trouvée sur CouchSurfing, avant d’aller explorer le parc de Torres del Paine, autre paradis du randonneur. Si le temps le permet!